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DU CAIRE
(les images sont cliquables)
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Égypte, trouvé à Fostat, XIe siècle Encre sur papier Le Caire, Musée d'art islamique |
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Égypte, XI-XIIe siècle Lin et soie Londres, The Board of Trustees of the Victoria and Albert Museum |
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orné d'animaux et d'une pseudo-inscription coufique Égypte, Edfu, Xe siècle Bois, ivoire ou os, pâte noire Le Caire, Musée d'art islamique |
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Égypte, Xe siècle Bronze Berlin, Staatliche Museen, Museum für Islamishe Kunst |
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Bol à la joueuse de luth, Bol au griffon Égypte, X - XIe siècle Céramique à décor lustré Athènes, Musée Benaki, Le Caire, Musée d'art islamique |
Après avoir fait bâtir pour lui une ville au nord de Fostat pour sa cour et ses gens, le calife fit son entrée dans sa nouvelle capitale,
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provenant du palais occidental Égypte, Le Caire, 2ème moitié du XIe siècle Bois Le Caire, Musée d'art islamique Frise réutilisée au XIIIe dans le Martisan de Qala'ûn |
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provenant du palais occidental Égypte, Xe - XIe siècle Marbre Le Caire, Musée d'art islamique Réutilisé dans la mosquée Sultân Fârâg b.Barqûq du Caire |
Décors- L'exposition que présente l'Institut du Monde Arabe vous invite d'abord à découvrir les beautés de ces palais
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Égypte, XIe - XIIe siècle Bronze Le Caire, Musée d'art islamique |
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Égypte, Xe - XIe siècle Bronze Munich, Staatliches Museum für Völkerunde |
Textiles - Ces mêmes traits de l'esthétique fatimide se retrouvent dans l'art du textile. Outre le célèbre "voile de sainte Anne" dont nous parlerons plus loin, l'Institut du Monde Arabe présente quelques pièces exemplaires qui témoignent d'un art accompli d'un étonnant raffinement. Le climat sec de l'Égypte a permis leur bonne conservation, et nombre d'entre elles ont été
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d'un manuscrit Égypte, vers le XIIe siècle Gouaches sur papier Koweit, Al-Sabah Collection of Islamic Art |
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Tunisie, première moitié du Xe siècle Parchemin, encres, gouaches et or Koweit, Al-Sabah Collection of Islamic Art |
Céramiques- Par sa technique spectaculaire et la grâce de ses décors, la céramique fatimide demeure l'une des plus belles de l'Histoire. Inventée en Iraq au IX siècle, la céramique lustrée, née d'une technique très complexe (une double cuisson avec raréfaction d'oxygène et fixation d'oxydes métalliques), connut en effet avec les Fatimides - qui firent venir des artisans iraqiens - son apogée. La technique, longtemps gardée secrète, permettait de donner aux pièces cet éclat métallisé, ces reflets profonds qui nous fascinent encore. Mais, ici aussi, la technique laissait à l'émotion la liberté de s'exprimer.
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Tunisie, Kairouan, milieu du Xe siècle Encre dorée sur parchemin teint en bleu Paris, Institut du monde arabe |
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au nom de Hamza ibn 'Ali, desendant de 'Alî Égypte, Xe - XIe siècle Marbre Le Caire, Musée d'art islamique |
Des talentueux orfèvres fatimides, un seul nous a laissé son nom, signé sous le fermoir d'un précieux coffret en argent
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Égypte, XIe siècle Céramique à décor lustré Le Caire, Musée d'art islamique |
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Égypte, XIe siècle Verre soufflé Le Caire, Musée d'art islamique |
Quant à "la plus précieuse des pierres", le cristal de roche, les artistes fatimides l'ont portée à un degré de raffinement inégalé
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Égypte, Xe - XIe siècle Bronze Londres, Keir Collection |
Les Objets de la vie quotidienne des Égyptiens au temps des Fatimides sont d'autant plus émouvants qu'ils sont rares. Révoltes, destructions, pillages, indifférence pour les objets apparemment sans valeur ont effacé les traces. L'exemple le plus accablant de ces pertes demeure celui de la "Maison du savoir", entièrement pillée (en même temps que les palais) lors de troubles graves vers 1070. Créée par le calife al-Hâkim en 1005, cette bibliothèque située proche du palais, et ouverte à tous, conservait plus de 200.000 manuscrits. Elle accueillait aussi bien des lecteurs du Coran que des scientifiques de différentes disciplines, grammairiens, médecins, astronomes ou mathématiciens. S'il ne reste hélas aucun témoignage de cette vie intellectuelle (on contemplera toutefois quelques feuillets de manuscrits rescapés, dont un très beau dessin de deux soldats), la vie religieuse nous a laissé un ensemble de documents et d'objets où se lit avant tout l'esprit de tolérance de chi'ites ismaéliens qu'étaient les Fatimides. Tolérance à l'égard de la majorité sunnite de la population égyptienne, tolérance aussi à l'égard des autres religions du Livre, christianisme et judaïsme.
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médaillon Italie du Sud ou Sicile, XIe - XIIe siècle Ivoire Berlin, Staatliche Museen Museum für Islamische Kunst |
Encore plus émouvants peut-être, car sans artifice et témoignant de la foi des plus humbles, sont les parchemins portant des textes hébraïques : celui qu'on roulait pour l'inclure dans une amulette porte-bonheur - tradition remontant à la plus haute antiquité -, ou ceux également retrouvés dans la vieille synagogue Ben Ezra à Fostat, portant des inscriptions magiques. On touche ici à un aspect plus profond de l'histoire des religions, quand superstition et foi imprègnent intensément la vie quotidienne. La synagogue a livré en même temps plusieurs documents en différentes graphies, traitant de nombreux sujets intéressant la communauté juive: lettre d'un professeur se plaignant d'un élève, par exemple, ou relation de l'arrivée d'immigrés juifs cherchant refuge au Caire... Ces documents très rares nous offrent ainsi quelques images saisissantes de la vie quotidienne.
Au cours des deux siècles fatimides, l'agglomération de Fostat et du Caire s'accrut considérablement, et dépassa aisément les
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calife al Musta'lî dit "Voile de Sainte-Anne" Égypte, Damiette, 1096-97 Lin, soie et or Apt, Collection de l'ancienne cathédrale d'Apt |
Les verriers se surpassaient eux aussi, toujours imprégnés des traditions du verre antique, qui les faisaient utiliser par exemple un si beau verre bleu, mais cherchant toujours améliorer leurs différentes techniques (verre lustré soufflé, moulé, etc.) Pour toujours plus de finesse et de légèreté. On pourra contempler ici des verres ornés, quelques aiguières et une lampe d'une remarquable exécution. La vitalité de l'activité économique se manifeste encore par le verre, au travers de petites pièces gravées qui permettaient de garantir un poids ou une mesure. Elle se manifeste enfin par quelques dinars, frappés dans un or qui venait du Soudan...
Rongée par les intrigues de cour, livrée aux ambitions de ministres et de vizirs dominant de leur puissance des califes intronisée dès l'âge tendre, devant faire face à un schisme divisant sa propre secte ismaélienne en même temps qu'à la considérable pression militaire des Croisés, la dynastie des Fatimides dut subir en sa capitale les occupations des armées franque puis syrienne. Elle s'éteignit en 1171, après le coup de grâce donné par son dernier vizir, un officier de l'armée syrienne dont l'Histoire allait retenir le nom : Saladin. Le vendredi 10 septembre 1171, après que le dernier calife fatimide, al-‘Âdid, eut été détrôné. La prière se fit à nouveau au nom du calife abbasside de Bagdad.
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Égypte, Xe siècle Cristal de roche; monture européenne en or et émail de la Renaissance. Florence, Trésor de San Lorenzo déposé au Museo delle Cappelle Medicee |
Souvenirs de pèlerins, trophées de guerre, cadeaux royaux échangés avec les souverains étrangers, sac de Constantinople lors de la quatrième croisade furent aussi à l'origine de la présence de l'art fatimide dans les églises et les palais d'Occident. Les trésors des églises médiévales, en particulier, reçurent volontiers les objets d'art fatimides, pour leurs matières précieuses et leur qualité d'exécution, et le clergé les "christianisa" en leur donnant un rôle dans l'apparat des rituels. Au point qu'après quelques générations, on avait souvent oublié leur origine.
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Égypte, XIe - XIIe siècle Bronze Le Caire, Musée d'art islamique |
On peut contempler longtemps l'harmonie parfaite et la grâce de quelques coffrets d'ivoire, ornés de cercles contenant chacun une figure en arabesque, musicien, paon, prince sur son trône. Des ivoiriers installés en Italie du sud se spécialisèrent dans la production d'olifants - autrement dit de cors d'ivoire taillés dans des défenses d'éléphant - très finement ciselés. L'olifant le plus célèbre est bien sûr celui de Roland à Roncevaux. Au Moyen Âge, ces cors servaient aussi à boire. La pièce présentée ici est ornée d'un extraordinaire décor de cercles entrelacés, dans lesquels s'inscrivent des animaux, familiers ou mythiques.
Deux pièces majeures de l'art textile, qui sont aussi deux "monuments" de
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Copie réalisée en 1993 en soie imprimée Original: Sicile, 113-34, soie, or perles, émailcloisonné et verre, conservé au Kunsthistorisches Museum de Vienne Côme, Ratti S.P.A |
Le deuxième chef d'oeuvre universel attestant de ce pouvoir de fascination intact est le célèbre "voile de sainte Anne", conservé dans le trésor de la cathédrale d'Apt, et présenté ici pour la première fois au public. Sommet absolu de l'art textile, on le considère aujourd'hui comme l'une des plus belles pièces fatimides connues. Une inscription indique qu'il a été réalisé dans le tirâz de Damiette, pour le calife al-Musta'lî, donc vers 1100. Il s'agit en fait d'un manteau, d'une 'abâ' semblable à celle que portent encore aujourd'hui les Saoudiens. En lin d'une extrême finesse, il est brodé au devant de deux bandeaux de tapisserie, et au dos d'une large bande sur laquelle s'inscrivent trois médaillions. Les bandes sont brodées de soie et d'or, tout comme les médaillions portant des motifs figuratifs. Pour représenter avec autant de sûreté et de grâce des oiseaux affrontés et différents personnages, les tisserands ont fait preuve ici d'une technique exceptionnelle et d'un raffinement inégalé. Le manteau fut sans doute rapporté en Occident par un croisé, et peut-être enveloppait-il déjà quelques reliques. Devenu pour les chrétiens un voile porté par la mère de Marie, il fut longtemps placé, roulé en boule, dans un flacon de verre, et présenté chaque année le jour de la sainte Anne. Ce merveilleux chef d'oeuvre est sans conteste un témoin éclatant de l'enchantement fatimide.
Dossier établi par Alain Blottière